samedi 27 juillet 2024
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Le scandale de Douce France : Un acte militant qui fait vaciller l’Assemblée nationale !

Le 19 novembre 1986, à l’Assemblée nationale à Paris, un acte militant et malicieux a eu lieu. Un commando pacifique composé de Jack Lang, ancien ministre de la culture et député du Loir-et-Cher, Charles Trenet et Rachid Taha a distribué aux députés un 45-tours du groupe de rock français Carte de séjour, formé en 1980 en banlieue lyonnaise. Ce groupe était composé de musiciens issus de la deuxième génération d’immigrés, dont les frères Mokhtar et Mohamed Amini, Rachid Taha, Djamel « Jess » Dif et Eric Vacquer.

Ce disque comportait une relecture énergique de « Douce France », l’une des chansons les plus célèbres de Charles Trenet. Écrite en 1943 sur une musique composée par son pianiste Léo Chauliac, elle ne sera enregistrée par Trenet qu’en 1947, car elle était considérée pétainiste avant cela. Sur un tempo ensoleillé et avec des instruments tels que le piano, le vibraphone, la trompette bouchée et la guitare acoustique, Trenet chante avec tendresse l’insouciance de l’enfance et son amour pour la France : « Oui je t’aime/ Dans la joie ou la douleur. » On peut lire dans ces mots une allusion ironique au persiflage dont il est victime à l’époque.

Après les accusations de collaboration qui le condamnent à huit mois d’inactivité à la Libération, Trenet partira pour les États-Unis en 1945, avant de revenir vraiment en France en 1954. « Douce France » est la chanson de la jeunesse d’une génération gâchée par la guerre, de la joie à la mélancolie, de la nostalgie de l’avant-guerre », selon Serge Hureau, directeur du Hall de la chanson à Paris. Cette chanson est à placer à côté de « La Folle Complainte », un trésor de 1945.

En 1986, Rachid Taha et ses camarades de Carte de séjour ont métamorphosé ce morceau en une ritournelle gaillarde. Cette reprise avait une valeur symbolique dans un contexte où la lutte contre le projet gouvernemental de réforme du code de la nationalité et ceux voulant remettre en cause le droit du sol était très importante après la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983, également connue sous le nom de « marche des Beurs ». Trenet avait apprécié ce détournement de sa chanson. « Il était ravi de l’impact de la relecture par Carte de séjour », selon Gérard Davoust, président des Editions Raoul Breton, qui représente l’essentiel du catalogue de Trenet.

Mots-clés: Carte de séjour, Rock français, Charles Trenet, Rachid Taha, Jack Lang, « Douce France », Marche pour l’égalité et contre le racisme, réforme du code de la nationalité, droit du sol, Serge Hureau, Gérard Davoust. Paris, 19 novembre 1986.

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