Le producteur ukrainien Alexandre Rodnianski a récemment été condamné à une peine de huit ans et six mois d’emprisonnement par un tribunal moscovite. Cette sentence a été prononcée pour avoir alerté, via son compte Instagram, sur les atrocités perpétrées par l’armée russe à Boutcha, révélées en avril 2022. Les découvertes tragiques, qui comprennent des corps abandonnés dans des fosses communes et des jardins de la banlieue de Kiev, ainsi que plus d’un millier de cadavres de civils dans la région, ont choqué la communauté internationale. En plus de la peine de prison, Rodnianski se voit également interdire d’administrer un site d’information ou un réseau de télécommunications.
Ancien président du festival de cinéma Kinotavr, Rodnianski est un acteur majeur du paysage audiovisuel ukrainien. « Je suis condamné pour des raisons politiques, » a-t-il déclaré au Monde. Ce cinéaste de 63 ans, créateur de la célèbre chaîne 1 + 1, a été un tremplin pour l’actuel président ukrainien, Volodymyr Zelensky, en lui donnant l’opportunité de briller à la télévision en 2003. Son fils, Alexandre Rodnianski Junior, occupe aujourd’hui le poste de conseiller économique auprès du président.
Cette décision de justice s’inscrit dans un contexte de répression visant à étouffer les voix journalistiques et créatives qui s’érigent contre la guerre. Rodnianski souligne : « Des dizaines des meilleurs écrivains et musiciens russes ont été condamnés avant moi pour faire taire les voix antiguerre. » Sa condamnation, fondée sur un nouvel article du code pénal russe, met en lumière les conséquences dramatiques d’un désaccord politique sur la liberté d’expression en Russie.
Avant l’attaque de l’Ukraine le 24 février 2022, Rodnianski était un acteur clé à Moscou, où il avait développé une carrière florissante. Au cours de sa carrière, il a produit des films qui ont été salués par la critique internationale, remportant de nombreuses distinctions, y compris des nominations aux Oscars et un César pour le meilleur film en langue étrangère en 2018 pour Faute d’amour.
La dernière sentence prononcée contre lui risque de renforcer un climat de peur dans le domaine du cinéma en Russie, mais Rodnianski rappelle qu’il demeure, avant tout, un artiste ukrainien. La répressive machine de l’État semble plus préoccupée par le contrôle des récits que par la vérité elle-même.
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