Justine Triet : quand l’exception culturelle française divise
Le samedi 27 mai, Justine Triet a remporté la Palme d’or pour son film Anatomie d’une chute lors du 76ᵉ Festival de Cannes. La réalisatrice a profité de son discours pour aborder des sujets politiques sensibles, ce qui a suscité des réactions diamétralement opposées. En premier lieu, elle a déploré le manque de considération du gouvernement pour la protestation contre la réforme des retraites, avant de s’attaquer à la marchandisation de la culture en France. Cette dernière prise de position, qui a été applaudie par une partie du public, a suscité l’agacement de l’autre moitié de l’assistance qui n’était pas d’accord avec ses prises de position politiques.
Le lendemain, la ministre de la culture, Rima Abdul-Malak, a exprimé son incompréhension devant un tel discours. Elle a notamment précisé que le film primé n’aurait jamais vu le jour sans le modèle français de financement du cinéma. La polémique a rapidement pris de l’ampleur sur les réseaux sociaux, avec des personnalités politiques qui ont pris parti. D’un côté, les représentants de la droite ont critiqué l’attitude de la réalisatrice en la qualifiant d’ « enfant gâtée », en recevant une récompense pour un film subventionné. De l’autre côté, les personnalités de gauche ont salué son courage et son talent.
Ce débat a mis en lumière une problématique fondamentale en France : l’exception culturelle. À travers cette expression, la France a voulu défendre son secteur culturel exceptionnel, qui se caractérise par une forte intervention de l’État et par un financement public important. Un modèle qui a permis à la France de produire des films ambitieux et de former des talents reconnus dans le monde entier. Toutefois, cette exception culturelle est de plus en plus remise en question, notamment par les partisans du libéralisme économique. Ces derniers accusent l’État de fausser la concurrence et de privilégier les grands studios au détriment des petites productions.
Le discours de Justine Triet a donc clivé l’opinion publique et suscité un débat passionné sur l’avenir de l’exception culturelle française. Si certains défendent le modèle actuel, d’autres appellent à une réforme du financement du cinéma et de la culture, pour plus de transparence et d’équité. Cette polémique monte en puissance alors que le secteur culturel subit de plein fouet les conséquences de la pandémie de Covid-19. Dans ce contexte, la prise de parole de Justine Triet prend une dimension politique qui dépasse le simple cadre du cinéma, et qui cristallise les enjeux d’une société en pleine mutation.
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