Valentin Marcone, trentenaire sans histoires submergé par la paranoïa
Valentin Marcone, trentenaire sans histoires submergé par la paranoïa, a été condamné lundi 29 janvier par la cour d’assises du Gard à trente ans de réclusion pour le meurtre de son patron et d’un de ses collègues dans une scierie des Cévennes en mai 2021. Le parquet avait demandé d’y ajouter une période de sûreté de vingt ans, mais le jury a estimé, après deux heures et demie de délibéré, que quinze ans de sûreté, la durée automatique pour les peines de trente ans, était une durée suffisante.
Un verdict clément
En revanche, comme requis par l’avocat général Bertrand Baboulène, les jurés ont écarté la préméditation. Et, comme lui, ils ont estimé que l’accusé, âgé aujourd’hui de 32 ans, « super-papa » d’une petite fille selon ses proches, était atteint de troubles ayant altéré son discernement au moment des faits.
« Il assume totalement ses actes et il accepte cette décision relativement clémente eu égard aux réquisitions de l’avocat général », a commenté après le verdict l’une des avocates de l’accusé, Florence De Prato, en précisant qu’ « a priori il n’envisage pas de faire appel d’une décision qu’il accepte ».
« Il faut que je me fasse soigner pour comprendre à quel point j’ai débloqué », avait déclaré l’accusé en s’exprimant une dernière fois avant que le jury se retire pour délibérer. « La justice est passée. Le plus dur pour nos clients sera certainement le chemin tortueux de la résilience », a déclaré de son côté Rémy Nougier, avocat des parties civiles.
Le déroulement des faits
Le 11 mai 2021, peu après son arrivée au travail, à la scierie du village des Plantiers, 250 habitants, Valentin Marcone avait abattu de deux balles en pleine tête son patron, Luc Teissonnière, 54 ans. Quelques secondes plus tard, ce tireur sportif, capable selon ses dires de toucher sa cible à 300 mètres, avait tiré sur Martial Guérin, 32 ans, un de ses collègues, touché à la tempe. Il ne leur avait donné « aucune chance de s’en sortir », a martelé le procureur.
Valentin Marcone avait seulement épargné le plus jeune salarié de l’entreprise, Vincent Amalric, alors âgé de 19 ans, qui s’était enfui et avait appelé les secours.
Après avoir tué ses deux collègues, Valentin Marcone s’était caché au cœur des Cévennes, dans un trou à sangliers, déclenchant une chasse à l’homme qui a mobilisé des centaines de gendarmes. Il s’était rendu au bout de trois jours.
Les raisons du crime
Au cours de son procès, il a expliqué avoir « pété un plomb » parce que son patron lui avait reproché « de ne pas [lui] avoir dit bonjour » : « J’ai dit à Luc : “Tu te fous de ma gueule ?” Martial m’a dit : “Tu es fou ?” J’ai sorti mon arme, je [lui] ai tiré dessus », avait raconté jeudi Valentin Marcone, son visage juvénile semblant n’exprimer aucune expression.
Mais « le mobile, il n’est pas là », pas dans cette « histoire de bonjour », ni dans ce conflit à propos d’heures supplémentaires, qui « était réglé », ou dans un éventuel projet de licenciement, a estimé lundi l’avocat général dans son réquisitoire. Non, pour le procureur, « le germe du crime, [Valentin Marcone] le porte en lui depuis bien des années : par son statut de victime, vraie ou supposée, par le fait qu’il était un enfant dyslexique, rejeté par les autres. Mais parce qu’on est dyslexique, va-t-on tuer son patron, ses collègues ? ». Les raisons sont aussi à chercher dans cette vie à huis clos où le jeune père de famille s’était pratiquement enfermé avec son épouse, dans la paranoïa et la personnalité rigide qu’il avait construites au fil de ses conflits avec ses employeurs, dans son « goût immodéré » pour les armes, dans son « sentiment d’injustice » qui confinait au complotisme. Dans son verdict, la cour a d’ailleurs condamné Valentin Marcone à un suivi psychiatrique de dix ans et a prononcé la confiscation de la douzaine d’armes, dont un fusil à lunette et un fusil d’assaut, qu’il possédait. A sa sortie de prison, il lui sera en outre interdit de se rendre aux Plantiers ou dans les villages voisins pendant dix ans. « Il se voyait un peu comme un shérif, cela en fait quelqu’un de très dangereux », avait conclu l’avocat général.
Conclusion
La justice a donc rendu son verdict dans cette affaire où le mobile du crime semble complexe et lié à des troubles bien ancrés chez l’accusé. La peine prononcée et les mesures de suivi psychiatrique visent à garantir la sécurité de la société à sa libération, tout en lui apportant l’accompagnement nécessaire pour comprendre et surmonter ses actes.
Mots-clés:
Valentin Marcone, Cour d’Assises, Cévennes, Meurtre, Paranoïa, Dyslexie, Armes à feu