La confiance des Français envers l’Etat et les institutions politiques a connu une embellie rarissime durant la pandémie de Covid-19, mais près de deux ans après le dernier confinement, la France a renoué avec sa singularité en Europe en affichant une très grande défiance envers les institutions politiques et les hommes politiques en général. C’est ce que révèle l’enquête annuelle réalisée par OpinionWay pour le Cevipof entre le 27 janvier et le 9 février dans quatre pays – la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Italie. Cette enquête démontre que les Français se disent suspicieux et méfiants en ce début de quinquennat, dans un pays déchiré par la réforme des retraites. Ils sont envers leurs concitoyens, leurs institutions, qu’elles soient nationales ou européennes, et envers la classe politique en général – tout en attendant de ces dernières davantage de protection.
La méfiance généralisée des Français donne le sentiment d’une société malade et fracturée, rapprochant désormais la France de l’Italie. Près des deux tiers considèrent que la démocratie ne fonctionne pas bien – 10 points de plus qu’il y a deux ans – contre moins de 40 % en Allemagne et 58 % en Italie. La situation n’empêche pas les Français d’exprimer à titre personnel une forme de bien-être, de sérénité, voire d’enthousiasme à la fin de la parenthèse Covid, selon les auteurs de l’étude. Cependant, la situation est fragile, car les tensions générées par le Covid ont eu des répercussions sociales profondes avec l’inflation, la crise de l’énergie et du pouvoir d’achat, qui sont en train de basculer vers de la colère et de l’insécurité.
Les Français sont peu intéressés par la politique, avec seulement la moitié d’entre eux qui se passionnent pour la vie publique, contre 77 % en Allemagne ou 65 % en Italie. La politique leur inspire en majorité « méfiance » et « dégoût », un sentiment qui s’était atténué pendant la crise du Covid-19, mais qui est de retour. Les hommes politiques sont vus comme « plutôt corrompus » et servant en priorité « leurs propres intérêts ». Ces résultats reflètent une crise structurelle de la représentation, qui est le cocktail parfait pour une crise sociale, souligne Gilles Ivaldi, chercheur au Cevipof.
Mots-Clés: crise sociale, défiance, institutions politiques, pandémie de Covid-19.