La Suisse provoque actuellement un certain agacement à l’étranger en raison de divers éléments : le refus de réexporter des armements helvétiques en Ukraine détenus par des partenaires européens, la recherche tardive d’actifs russes en Suisse ou encore des relations stagnantes avec l’Union européenne. À seulement six mois des élections fédérales du 22 octobre, le Conseil fédéral semble paralysé par les enjeux électoraux, tandis que l’Union démocratique du centre (UDC), parti souverainiste et europhobe crédité d’environ 26 % d’intentions de vote, atteint son plus haut niveau depuis 2015.
Ce parti, qui a fait de l’isolationnisme sa marque politique depuis trois décennies, profite de l’isolement actuel de la Suisse sur la scène internationale. Selon son responsable historique, Christoph Blocher, industrielle milliardaire âgé de 82 ans, cette montée en puissance s’explique facilement : « La population en a assez de cet internationalisme ambiant. ». Bien qu’il ne soit plus ni ministre ni député, ce dernier continue à diffuser ses diatribes de « Neinsager » (« ceux qui disent non »).
Pour Christoph Blocher, la Suisse ne devrait pas renoncer à son isolationnisme, comme l’a récemment fait la Finlande en adhérant à l’OTAN, car la situation est différente : « La Suisse se trouve dans une situation complètement différente des Finlandais ou des pays baltes. […] Pour la Suisse, petit État neutre, le défi est différent. Elle ne se mêle pas des conflits des autres. Et elle défend seule son territoire. Cette stratégie nous réussit parfaitement puisque nous n’avons plus connu la guerre depuis deux siècles. Je reconnais que cette neutralité est toujours difficile à comprendre à l’étranger. Aussi devons-nous insister sur ce que ce statut nous permet d’offrir, par exemple la diplomatie des bons offices, un statut de médiateur strictement neutre. »
En février 2022, après avoir hésité une semaine, Berne s’est finalement alignée sur l’ensemble des sanctions européennes à l’encontre des proches du Kremlin en réponse à l’invasion russe de l’Ukraine. Une entorse à la neutralité suisse inacceptable selon Christoph Blocher : « En participant à ce conflit, nous sommes de facto devenus l’un des ennemis de la Russie, ce pour quoi nous avons d’ailleurs reçu les félicitations du président américain, Joe Biden. C’est regrettable, car il faudra bien un jour mettre un terme à ce conflit, et la Suisse aurait pu servir de médiateur. D’ailleurs, la dernière rencontre entre Poutine et Biden avant la guerre s’est tenue à Genève en juin 2021. Mais, pour les Russes, la Suisse n’est plus une option. »
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