À partir du 1er janvier 2025, la présence de titres de presse nationale et internationale dans les kiosques de Polynésie française prendra fin. Hachette Pacifique, seul distributeur sur ce territoire, a récemment informé les buralistes de l’arrêt imminent de la livraison de la presse. Cette décision suscite de vives inquiétudes parmi les professionnels et les passionnés de l’information, déjà affectés par une distribution précaire.
Ce changement de cap ne vient pas sans précédent. La distribution de la presse dans cette immense étendue du Pacifique, qui s’étend sur une superficie comparable à celle de l’Union européenne, a été un défi récurrent. La pandémie de Covid-19 a exacerbé la situation, entraînant une interruption de la livraison de quotidiens dès 2020. Bien que l’expédition par bateau ait continué, elle a été marquée par des retards significatifs, dépassant parfois un mois par rapport à l’Hexagone.
Un service jugé insoutenable
L’entreprise Hachette Pacifique n’a pas souhaité s’exprimer sur les raisons de cette cessation, mais a récemment sollicité une aide financière du Haut-Commissariat de France en Polynésie, plaidant un service « largement déficitaire ». Cette annonce a suscité une incompréhension croissante au sein de la communauté locale, alors que la seule réponse du gouvernement a été que la collectivité « n’a pas à se substituer aux acteurs privés ». Dans les tabacs-presse de Tahiti, les quelque 600 titres encore disponibles feront bientôt place à quelques engagements locaux, en laissant la part belle à Tahiti Infos, le seul quotidien survivant.
Monique Tautia, une employée de 62 ans d’une maison de presse à Pirae, témoigne de la tristesse ambiante : « Ça fait mal au cœur de voir que tout ça va disparaître ». Son métier, qui ne consiste qu’à ranger des magazines sans pouvoir les lire, l’a amenée à observer l’évolution des goûts au fil des décennies. Les modes se succèdent, et la disparition des magazines d’histoire, absents il y a quatre décennies, interpelle.
Vers une redistribution alternative ?
Eric Matton, directeur de la distribution de presse chez France Messagerie, a évoqué la possibilité d’une alternative de distribution via la Nouvelle-Calédonie. Néanmoins, ce projet reste incertain, compte tenu des répercussions des récentes émeutes sur la distribution calédonienne. Cette situation fragilise d’autant plus les derniers bastions de la presse dans la région.
Implications économiques pour les commerces locaux
Laurent Martinez, propriétaire de la maison de presse où travaille Monique Tautia, exprime de vives préoccupations face à cette situation. Avec 20 % de son chiffre d’affaires généré par la presse, la cessation des livres entraînant potentiellement la perte de clients réguliers, il envisage des conséquences dramatiques pour son entreprise familiale. La diversification de son commerce, qui inclut désormais papeterie et jeux de hasard, témoigne d’une tentative de résilience face à cette crise, mais le futur reste incertain.
Dans cette conjoncture délicate, l’espoir d’une impression locale de titres nationaux représente une lueur d’espoir, même si peu de solutions concrètes semblent émerger à court terme. L’une des conséquences évidentes de cette situation difficile est l’impact que cela pourrait avoir sur la vie sociale et culturelle de la Polynésie française, qui perd progressivement son accès à l’information nationale et internationale.
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