mercredi 22 janvier 2025

Pénurie d’amoxicilline : des flacons détruits pour l’esthétique

En pleine pénurie nationale d’amoxicilline, un antibiotique crucial pour soigner des infections courantes, une révélation choc frappe l’opinion publique : des milliers de flacons ont été détruits pour de simples défauts esthétiques. Une enquête menée par l’équipe de Cash Investigation pointe directement le laboratoire pharmaceutique GSK, unique producteur de ce médicament en France, laissant les hôpitaux et pharmacies face à une crise sans précédent. Alors que la demande explose, ce gaspillage massif soulève des questions sur la gestion éthique des stocks et la responsabilité des autorités, dans un contexte où chaque flacon pourrait littéralement sauver des vies.

Pénurie d’amoxicilline et destruction massive par GSK, un scandale en pleine crise

Alors que la France traverse une pénurie critique d’amoxicilline, un antibiotique essentiel, des révélations choquantes ont remis en question les pratiques de GSK, propriétaire de la seule usine en France fabriquant ce médicament. Ce laboratoire, basé à Mayenne, avait obtenu une augmentation de 10 % du prix d’achat auprès de l’État français en contrepartie d’un engagement à accroître l’approvisionnement. Cependant, une enquête récente menée par l’équipe de Cash Investigation a révélé que GSK a procédé à la destruction massive de flacons, et ce pour des raisons purement esthétiques. Une nouvelle qui interroge, alors que les hôpitaux et les pharmacies peinent à répondre à une demande toujours croissante pour cet antibiotique vital.

Une infiltration révèle des pratiques troublantes chez GSK

En janvier 2024, une journaliste de Cash Investigation s’est infiltrée au sein de l’usine GSK à Mayenne, travaillant discrètement sur la ligne de contrôle des emballages. Elle a découvert que les flacons d’amoxicilline produits étaient destinés majoritairement au Japon, un pays connu pour ses exigences rigoureuses sur l’apparence des emballages. Selon une formatrice de l’usine, même les plus infimes défauts esthétiques deviennent un motif valide pour rejeter les produits. Pourtant, ces imperfections, purement visuelles, n’affectent en rien l’efficacité ou la qualité du médicament. Ces flacons sont donc systématiquement écartés et détruits, malgré l’urgence sanitaire en France. Cette situation soulève des questions sur l’éthique et les priorités de GSK en pleine crise sanitaire.

Le gaspillage d’amoxicilline en chiffres : une réalité alarmante

Les chiffres révélés par l’enquête sont édifiants. En seulement une heure de travail, la journaliste infiltrée et ses collègues ont dû rejeter environ une centaine de flacons d’amoxicilline pour des raisons esthétiques. Selon un responsable de l’usine, ce phénomène concerne entre 10 % et 15 % de la production totale. Cela représente des milliers de flacons détruits chaque année, et probablement plusieurs dizaines de milliers depuis le début de la pénurie fin 2023. Ces produits, pourtant conformes sur le plan pharmaceutique, auraient pu répondre à des besoins urgents en France, notamment dans les hôpitaux confrontés à des ruptures répétées de stocks. Cette gestion pose un problème majeur, alors que chaque flacon détruit symbolise une opportunité gaspillée pour sauver des vies.

Réactions mitigées et manque d’anticipation des autorités

Face à ces révélations, les réactions des autorités et du laboratoire GSK ont été pour le moins déconcertantes. Interrogé, le laboratoire a indiqué par courriel « ne pas savoir à quoi le magazine faisait référence ». Cette réponse évasive contraste avec l’urgence de la situation. Du côté des autorités, Grégory Emery, directeur général de la santé, a affirmé ne pas avoir été informé de ces pratiques. Il a ajouté que, s’il avait eu connaissance de ces destructions, il aurait exigé que ces produits alimentent le marché français. Ce manque flagrant d’anticipation et de communication entre les autorités et l’industrie pharmaceutique a amplifié une crise déjà critique, suscitant colère et indignation parmi les professionnels de santé et les citoyens.

Quand l’esthétique prime sur l’urgence sanitaire

La priorité donnée aux critères esthétiques au détriment des besoins sanitaires soulève des interrogations sur le fonctionnement de l’industrie pharmaceutique. GSK a clairement privilégié les exigences strictes du marché japonais, où les défauts d’emballage, même insignifiants, sont inacceptables. Cette politique de perfection esthétique, bien qu’importante pour certaines normes industrielles, semble totalement inadéquate dans le contexte actuel de pénurie. Il est difficilement concevable qu’en pleine crise sanitaire, les imperfections mineures d’un emballage aient pu justifier la destruction de milliers de flacons d’un médicament aussi vital. Cette approche alimente le débat sur le rôle des laboratoires : doivent-ils répondre aux exigences commerciales ou soutenir prioritairement les besoins de santé publique ?

Vers un modèle de production centré sur les besoins de la France

Face à l’ampleur de ce scandale, une refonte du modèle de production semble indispensable. De nombreuses voix appellent à un système davantage centré sur les besoins nationaux. Pour éviter de nouvelles crises, une régulation plus stricte pourrait être mise en place afin de garantir qu’une part significative de la production de médicaments critiques soit réservée prioritairement au marché français. Cela nécessiterait des investissements pour moderniser les infrastructures, augmenter les capacités de production et diversifier les sources d’approvisionnement. L’État pourrait également renforcer son rôle de surveillance et imposer des conditions plus fermes aux laboratoires opérant sur le territoire national. Une telle restructuration permettrait de limiter la dépendance aux importations et d’assurer une réponse rapide et efficace face aux crises sanitaires futures.

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