Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a réaffirmé les tensions persistantes entre l’Algérie et la France, en rejetant catégoriquement l’idée d’un voyage à Paris, qu’il qualifie d’humiliant. Cette déclaration a été faite lors d’un entretien télévisé, après sa réélection triomphale le 7 septembre 2024 avec plus de 94% des voix. Cette situation s’inscrit dans un contexte où les relations diplomatiques entre les deux nations se sont dégradées, particulièrement après le soutien apporté par la France à un plan d’autonomie marocain concernant le Sahara occidental, un sujet sensible pour l’Algérie.
Le président Tebboune a évoqué l’idée de « ne pas aller à Canossa », une énorme référence historique illustrant la soumission, et il a mis en exergue les blessures laissées par la colonisation française en arguant que l’Algérie a subi une forme de génocide au cours de cette période. En s’exprimant sur ce sujet controversé, il a souligné que le pays a perdu une grande partie de sa population, passant d’environ quatre millions à moins de neuf millions en 132 ans. Il dénonce une fausse représentation du passé algérien par des « minorités haineuses » en France.
Des relations aux abois
Les relations entre l’Algérie et la France ont récemment atteint un nouveau bas niveau. Le président Tebboune a indiqué que sa visite en France, qui avait été prévue entre fin septembre et début octobre 2024, a été annulée en raison du climat explosif entre les deux pays. À la suite de l’annonce de l’appui français au plan d’autonomie du Maroc pour le Sahara occidental, l’Algérie a rappelé son ambassadeur à Paris et a diminué sa représentation diplomatique. Cette réaction a pendant à illustrer la fragilité des liens entre Alger et Paris, qui oscillent entre coopération et tension.
Les ombres du passé
En évoquant le passé colonial, M. Tebboune a insisté sur la nécessité de reconnaître les atrocités commises durant la colonisation française, affirmant que « l’Algérie a[vait] été choisie pour le grand remplacement ». Cette notion renvoie à des massacres ayant visé la population algérienne locale. En outre, il a soulevé la question des essais nucléaires menés par la France entre 1960 et 1966, affirmant que des retombées radioactives continuent d’affecter la région. « Vous voulez qu’on soit amis, venez nettoyer les sites des essais nucléaires ! » a-t-il déclaré à l’adresse de la France, reflétant ainsi le sentiment d’impunité sur ce sujet.
Vers une reconciliation ?
Malgré ces tensions, M. Tebboune a également mentionné l’accord franco-algérien de 1968, qui accorde des droits spécifiques aux Algériens en matière d’immigration et de travail en France. Cet accord est aujourd’hui contesté par des voix extrêmes en France et a été au cœur d’un débat parlementaire en décembre 2023. Pour lui, cet accord est devenu un bouclier pour les extrémistes de droite cherchant à y mettre fin. « C’est devenu un étendard derrière lequel marche l’armée des extrémistes », a-t-il soulevé, soulignant ainsi l’importance de cet héritage dans le dialogue actuel entre les deux nations.
Appel à la vérité historique
Dans le contexte toujours tendu des relations entre l’Algérie et la France, le président algérien a exprimé le besoin pressant de rétablir une mémoire commune. Loin de l’image d’une réconciliation rapide, il a mis en avant un appel à l’honnêteté et à la prise de conscience des enjeux historiques. « On demande la vérité historique », a martelé M. Tebboune, se positionnant en défenseur d’une mémoire collective algérienne qui doit être entendue et respectée par la France.
En somme, le discours de M. Tebboune illustre non seulement les défis actuels dans la relation entre l’Algérie et la France, mais aussi la volonté de l’Algérie de rétablir son honneur et d’obtenir une reconnaissance des traumas que lui a infligés son passé colonial. Les années à venir seront cruciales pour voir si des avancées pourront être faites sur ces questions mémorielles et diplomatiques.
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