En Tunisie, des centaines de manifestants, près de 800 selon des journalistes de l’Agence France-Presse, ont exprimé leur mécontentement le 4 octobre 2024, en brandissant des pancartes dénonçant les atteintes aux libertés sous le régime du président Kaïs Saïed. Dans un climat politique tendu, alors que le pays se prépare à élire son nouveau président, les voix s’élèvent pour protester contre ce qu’ils appellent une « mascarade électorale ».
La situation actuelle en Tunisie résulte d’une série de mesures prises par Kaïs Saïed depuis son accession au pouvoir en 2019, qui ont conduit à une aggravation des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Le climat avant les élections de dimanche s’annonce creditieux, soulevant des inquiétudes sur la légitimité du scrutin face aux arrestations d’opposants politiques et à la censure croissante des voix dissidentes.
Une société civile en ébullition
Les manifestations du 4 octobre font écho à une mobilisation populaire croissante contre les violations des droits fondamentaux. Des milliers de citoyens et de figures de la société civile se rassemblent pour clamer des slogans comme « Ni peur ni terreur, le pouvoir est entre les mains du peuple
». Cette mobilisation s’inscrit dans un cadre historique : la Tunisie, berceau du printemps arabe, continue de lutter pour préserver les acquis de la révolution, parmi lesquels figurent la liberté d’expression et les droits associatifs.
Les actions des forces de l’ordre, qui ont déployé unités antiémeutes et camions à eau, témoignent de la préoccupation du gouvernement face à cette vague de contestation. Les manifestants, comprenant de nombreux jeunes et militants des droits humains, ont ainsi interpellé le pouvoir sur la légitimité du processus électoral en cours, dénonçant un climat d’oppression.
Des arrestations préoccupantes
Depuis l’été 2021, lorsque Kaïs Saïed a concentré les pouvoirs en s’opposant à la constitution, le nombre d’opposants arrêtés a explosé. Selon Human Rights Watch, « plus de 170 personnes sont actuellement détenues pour des motifs politiques ou pour avoir exercé leurs droits fondamentaux ». Ces chiffres soulignent l’étendue des atteintes aux libertés individuelles et à la dignité humaine, alimentant ainsi le ressentiment populaire contre un régime jugé autoritaire.
Des figures emblématiques de la société civile, des syndicalistes et des avocats se retrouvent également derrière les barreaux, souvent sous prétexte de lois sur les « fausses nouvelles » qui limitent la liberté d’expression. Cette répression nourrit un climat de méfiance croissante au sein de la population. Bassem Trifi, président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme, a fait remarquer que « la rue est encore active pour dénoncer les atteintes aux libertés et aux droits humains deux jours avant les élections »
.
Un paysage électoral contesté
Le scrutin de dimanche suscite de vives interrogations. Les manifestants appellent au boycott des élections à travers des slogans forts, tels que « Kaïs Saïed a piétiné les libertés ». Pour Leila Chebbi, actrice et militante, « je boycotte des élections qui enfreignent la loi et ne sont pas légitimes »
. De leur côté, de nombreux Tunisiens dénoncent un processus électoral biaisé, marqué par des conditions de parrainage impossibles pour les candidats potentiels, l’emprisonnement de prétendants et l’éviction de figures politiques significatives.
Les slogans des manifestants, tels que « pays de répression et dictature »
et « fête électorale transformée en coup d’État »
, illustrent l’opposition marquée d’une partie de la société contre un système qu’ils jugent inacceptable. Dans ce contexte, les revendications populaires rappellent les luttes passées, évoquant le slogan phare « liberté, liberté » qui a animé le soulèvement de 2011 contre le dictateur Zine El-Abidine Ben Ali.
À l’approche des élections, la situation reste tendue alors que la société civile continue de résister et de revendiquer ses droits face à ce qu’elle considère comme une profonde dégradation démocratique dans le pays. Les jours à venir seront décisifs pour l’avenir politique de la Tunisie et pour le respect des droits humains.
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