Dedan Kimathi, chef charismatique de la rébellion Mau-Mau au Kenya, a été exécuté par les colons britanniques en 1957. Soixante-cinq ans plus tard, sa tombe reste introuvable et il n’a toujours pas été dignement inhumé. Sa veuve, Mukami Kimathi, s’était battue pour obtenir la vérité sur le lieu de sépulture de son mari, mais elle est décédée sans avoir obtenu gain de cause. En décembre 2022, elle déclarait vouloir que le roi Charles et le président William Ruto interviennent pour résoudre cette affaire.
Le 13 mai, Mukami Kimathi a reçu des funérailles nationales, mettant fin à son combat pour la justice. Les membres du gouvernement et de l’opposition se sont tous recueillis devant son cercueil. Le président William Ruto a promis de collaborer avec les vétérans Mau-Mau pour retrouver les restes de Dedan Kimathi, mais depuis cette annonce, aucune action concrète n’a été entreprise.
Cette situation soulève des interrogations quant à la volonté réelle du Kenya de retrouver les restes de l’un de ses héros. Nelson Mandela lui-même avait posé cette question lors de sa visite dans le pays en 1990 : pourquoi la tombe de Dedan Kimathi n’existe-t-elle pas ? Alors que le Kenya s’apprête à célébrer les 60 ans de son indépendance, il est troublant de constater que la mémoire de ce combattant pour l’indépendance n’est pas préservée.
L’historienne Lotte Hugues pense que la complexité et la controverse entourant le mouvement Mau-Mau expliquent cette situation. Pendant les années 1950, de nombreux Kényans n’étaient pas des partisans des Mau-Mau, certains jouaient même un double jeu avec les colons britanniques. La rébellion, qui a eu lieu entre 1952 et 1960, était en effet conduite principalement par des membres de la communauté kikuyu, représentant 24% de la population kényane. Les autorités coloniales ont répondu à cette guérilla insaisissable en décrétant l’état d’urgence et en emprisonnant les sympathisants. Environ 10 000 Mau-Mau ont été exécutés par la couronne britannique, et plus de 200 000 Kényans ont été emprisonnés dans des conditions inhumaines.
L’ampleur de ces atrocités rappelait les conditions des camps de concentration nazis ou communistes, selon l’ancien procureur général de la colonie, Eric Griffith-Jones. Ces souvenirs douloureux expliquent en partie la réticence du Kenya à honorer la mémoire de Dedan Kimathi et des Mau-Mau de manière officielle.
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