vendredi 22 novembre 2024
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Vaincre ou mourir: le film qui réécrit l’histoire

Vaincre ou mourir est donc bien plus qu’un film historique, c’est un manifeste politique. Pour l’un comme pour l’autre, le résultat est plus que discutable, mais il n’en reste pas moins que cette production a le mérite de pousser à réfléchir sur l’utilisation de la mémoire nationale à des fins idéologiques.

Vaincre ou mourir, le long-métrage de Paul Mignot et Vincent Mottez, produit par Puy du Fou Films et StudioCanal, est plus qu’un simple divertissement commercial. Il s’agit, en effet, d’un film manifeste visant à proposer une relecture de l’un des épisodes les plus controversés de la mémoire nationale française : les guerres qui ont ravagé la Vendée de 1793 à 1796, opposant les troupes de la République à des armées paysannes refusant la conscription et défendant la monarchie et la foi catholique.

L’histoire se focalise sur l’épopée tragique et désespérée de François Athanase Charette de la Contrie, dit Charette (1763-1796). Ce dernier, héritier d’une famille qui paie l’« impôt du sang » depuis des siècles, se voit contraint de prendre la tête des paysans révoltés contre la « levée en masse » décrétée en mars 1793 par la Convention. Incapable de rivaliser avec les armées « bleues » en bataille rangée, le chef de guerre se lance vite dans d’épuisantes escarmouches à travers les chemins creux qui sillonnent le bocage, harcelant des armées républicaines dirigées par des brutes sanguinaires. Malgré son courage et sa détermination, Charette finit par être capturé et exécuté à Nantes, le 29 mars 1796.

Dépeint en héros chevaleresque, Charette est défenseur d’une cause « juste » et à la tête de paysans au « cœur pur ». Dans un contexte où la tradition contre-révolutionnaire s’est emparée de l’outil cinématographique depuis le début du XXe siècle, Vaincre ou mourir affirme rétablir une vérité dissimulée. Si le film simplifie à outrance la situation en Vendée et passe sous silence les divisions qui traversent les armées républicaines, il n’en est pas moins vrai qu’il est exact factuellement et ne peut pas être accusé d’exagérer la violence de la répression.

Cependant, le véritable intérêt de ce film se situe à un autre niveau. Prolongement de l’entreprise mémorielle incarnée depuis la fin des années 1970 par le parc d’attractions du Puy du Fou, il a été conçu comme une arme idéologique contemporaine. Difficile de ne pas voir dans les Vendéens célébrant clandestinement la messe en rase campagne les ancêtres de ces catholiques qui refusent les avancées de Vatican II, ni dans ces nobles émigrés lointains et pusillanimes les devanciers d’élites mondialisées accusées d’avoir abandonné à lui-même un peuple condamné à renoncer à ses valeurs… Sous couvert de parler de la France de 1793-1795, Vaincre ou mourir véhicule un discours beaucoup plus actuel, fidèle décalque des paniques morales de la droite identitaire.

Vaincre ou mourir est donc bien plus qu’un film historique, c’est un manifeste politique. Pour l’un comme pour l’autre, le résultat est plus que discutable, mais il n’en reste pas moins que cette production a le mérite de pousser à réfléchir sur l’utilisation de la mémoire nationale à des fins idéologiques.

Mots-Clés: François Athanase Charette de la Contrie, Vendée, République, Puy du Fou, Philippe de Villiers, Marie-Antoinette, Jean-Baptiste Carrier, Turreau, Jean-Clément Martin, Victor Hugo, Honoré de Balzac, Alexandre Dumas, Vatican II.

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