Les maisons indiennes en Guyane, dont huit au total, étaient des établissements pensionnats administrés par l’Église catholique et subventionnés par l’État depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ces institutions accueillaient des enfants issus des communautés autochtones, estimées à environ 2 000 individus, pour les scolariser en internat de l’âge de 4 ans à 16 ans. Bien que l’apogée des maisons indiennes se situe entre la fin des années 1940 et le début des années 1980, le dernier établissement n’a fermé qu’en 2023.
L’ancien pensionnaire et juriste kali’na, Alexis Tiouka, ainsi que l’ouvrage d’Hélène Ferrarini intitulé « Allons enfants de la Guyane. Eduquer, évangéliser, coloniser les Amérindiens dans la République » (Anacharsis, 2022), ont contribué à mettre en lumière l’histoire des maisons indiennes dans le débat public en Guyane et en France métropolitaine. Ces initiatives ont également permis de libérer la parole des anciens pensionnaires, hommes et femmes, qui avaient longtemps gardé le silence sur leur vécu.
Suite à ces révélations, le Collectif pour la mémoire des maisons indiennes, fondé à Cayenne en février 2023, cherche à obtenir une reconnaissance officielle de la vérité sur ces établissements. Ce collectif, composé en partie d’anciens pensionnaires, travaille à la création d’une commission vérité et réconciliation pour faciliter la résilience individuelle et collective. L’IFJD-Institut Louis-Joinet, une organisation spécialisée dans la justice transitionnelle, a mené une enquête sur cette question en réponse aux demandes de divers acteurs autochtones, notamment le grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenges de Guyane.
Cette investigation a révélé des pratiques coercitives dans les maisons indiennes, visant à transformer l’identité culturelle et religieuse des élèves pour les conformer à un modèle français et catholique. Les enfants autochtones étaient contraints de renoncer à leurs coutumes, langues et religions au profit d’une identité jugée conforme à la culture dominante. Ces pratiques étaient soutenues par une législation discriminatoire qui qualifiait les populations autochtones de « populations primitives ». Les gendarmes intervenaient régulièrement pour forcer les familles à envoyer leurs enfants dans ces établissements, considérant que ces derniers devaient être isolés de leur communauté pour être « éduqués comme des orphelins ».