L’Arabie saoudite avait envisagé de laisser derrière elle les bouleversements des « printemps arabes », qui avaient éclaté en mars 2011, pour instaurer une « harmonie des autocrates » au sein du Moyen-Orient. Cependant, les événements survenus depuis le 7 octobre 2023 ont perturbé son projet visant à cimenter le développement économique comme fondement d’une nouvelle stabilité régionale. La prise de contrôle de Damas par les rebelles syriens, le 8 décembre 2024, ainsi que l’attaque dévastatrice du Hamas contre Israël, ont bouleversé la stratégie de normalisation que Riyad espérait établir, tant avec l’ancien régime syrien qu’avec l’État hébreu.
« Avant le 7 octobre, l’Arabie saoudite aspirait à un univers où les dynamismes économiques supplanteraient les enjeux politiques. Le 7 octobre, cette réalité politique leur a explosé à la figure, révélant les limites de leur discours nationaliste », analysait Stéphane Lacroix, chercheur associé au CERI-Sciences Po Paris. Après un début aventureux, qui s’est tourné contre le royaume, comme en témoigne la guerre au Yémen entamée en 2015, le prince héritier Mohammed Ben Salman, souvent désigné par ses initiales « MBS », a opté depuis 2020 pour une approche mesurée et stratégique vis-à-vis des questions régionales, orientant ainsi sa position concernant le conflit palestinien et les nouvelles autorités à Damas.
Une nouvelle ère de leadership pour Riyad
Portant les ambitions d’une jeune génération néolibérale, « MBS » a su insuffler un nouveau souffle à la politique étrangère saoudienne, marquée par un discours nationaliste mais aussi pragmatique, contrastant avec le style de son père, le roi Salman. « Le roi Salman conserve l’autorité ultime sur les décisions cruciales concernant la politique nationale. En réalité, son fils “MBS” gère la majorité des choix stratégiques, surtout sur des thèmes sensibles comme celui de la Palestine », précise Hussein Ibish, expert en affaires du Golfe au sein de l’Arab Gulf States Institute à Washington. Une telle dynamique de pouvoir a permis à l’Arabie saoudite d’adapter son approche face à des défis variés dans un contexte géopolitique en constante évolution.
Les conséquences des événements récents
Les répercussions des événements du 7 octobre ont été immédiates et profondes. La tentative de Riyad de stabiliser la région par le biais d’alliances économiques a été mise à mal. La situation conflictuelle à Damas et les hostilités accrues en Palestine ont réactiver des tensions anciennes, compliquant ainsi les relations diplomatiques et exacerbant les dilemmes stratégiques des dirigeants saoudiens. La paix, tant recherchée par le prince héritier, semble s’éloigner alors que de nouveaux défis émergent et que les réalités sur le terrain s’imposent. Chaque mouvement diplomatique doit désormais tenir compte de cette nouvelle donne.
Perspectives pour le futur
À l’avenir, la manière dont l’Arabie saoudite naviguera dans ces tumultes déterminera non seulement sa stabilité interne, mais également son influence sur le plan régional. La quête d’un équilibre entre le développement économique et la gestion des crises politiques représente un défi colossal. Le défi majeur pour « MBS » sera de redéfinir son approche pour construire des relations constructives avec ses voisins tout en demeurant attentif aux aspirations de son propre peuple qui réclame des réformes socio-économiques.
À l’aube de cette nouvelle ère, l’Arabie saoudite semble devoir jongler habilement entre tradition et modernité, tout en gardant en tête qu’en politique au Moyen-Orient, il est souvent impensable de dissocier l’économie du politique. Les attentes des observateurs internationaux sont élevées; beaucoup espèrent une évolution positive qui pourrait influencer le cours des événements dans l’ensemble de la région.
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