La question de la « financiarisation de l’offre de soins » soulève des préoccupations croissantes concernant l’influence des acteurs privés sur le secteur de la santé. Un rapport récent de la commission des affaires sociales du Sénat met en lumière cette dynamique, mettant en avant les pratiques et les effets possibles sur la qualité des soins. Une telle évolution pourrait-elle transformer notre approche des soins médicaux ? Cet article déploie un regard sur les enjeux soulevés par cette tendance actuelle.
La santé est un sujet qui touche à l’intimité et au bien-être de chacun d’entre nous. Dans un contexte où les cliniques privées et laboratoire de biologie prennent une place prépondérante, la question de leur financement suscite des débats passionnés. Une mission d’information du Sénat, présidée par Bernard Jomier, Corinne Imbert et Olivier Henno, a récemment remis un rapport interrogatif intitulé « Une OPA sur la santé ? ». Dans ce document, qui s’étend sur 256 pages, des éclaircissements sont apportés sur la transformation en cours au sein du système de santé français.
Un secteur en pleine mutation
Le rapport décrit un paysage où la « bascule » vers une financiarisation accrue est déjà bien avancée dans certains domaines, comme les cliniques à but lucratif. Effectivement, environ 50 % du marché français y est contrôlé par quatre grandes entités : Ramsay Santé, Elsan, Vivalto et Almaviva. De plus, le secteur des laboratoires de biologie médicale apparaît comme le plus « financiarisé ». Six groupes dominent actuellement avec deux tiers des sites, ce qui les place face à l’Assurance-maladie. Cette situation a conduit à des mouvements de grève, notamment entre le 20 et le 23 septembre, contestation résultant d’une application de tarifs envisagée à la baisse.
Dynamique de l’imagerie médicale
En revanche, d’autres secteurs, tels que l’imagerie médicale, connaissent une montée rapide de l’intérêt des investisseurs. Ce domaine, qui pourrait être considéré comme étant à 20-30 % de son potentiel financier, ainsi que des centres de santé, notamment dentaires et ophtalmologiques, montrent une forte attractivité pour des entreprises comme Ramsay Santé et Ipso. Ces entreprises commencent à s’implanter dans des champs jusqu’à présent dominés par des praticiens indépendants.
Transformation de la structure du capitalisme en soins
Les rapporteurs analysent cette évolution comme un passage d’un « capitalisme dit professionnel » à un « capitalisme financiarisé ». Cela implique que les acteurs financiers extérieurs prennent le contrôle des décisions stratégiques, tandis que, historiquement, médecins et professionnels de santé géraient eux-mêmes leurs pratiques. Ce changement soulève des inquiétudes quant à la transparence des processus de rémunération des actionnaires et à la régulation par les autorités compétentes.
Une boîte noire pour les autorités
Le rapport évoque le caractère « rentable » et « sûr » de ces investissements pour les groupes privés, soulignant des valorisations pouvant atteindre jusqu’à quinze fois l’excédent brut d’exploitation dans certains secteurs, tels que l’imagerie médicale. Néanmoins, il reste flou sur les mécanismes de rémunération, qualifiés de « boîte noire », soulevant ainsi des questions sur la capacité des agences régionales de santé et de l’Assurance-maladie à garantir le respect des critères d’accessibilité, de qualité et de pertinence des soins.
Face à cette transformation du système, il est impératif que les décideurs publics prennent conscience des enjeux en jeu. Alors que la financiarisation peut apporter des ressources, elle pourrait également mettre en péril l’idée même du soin, ancré dans des valeurs de solidarité et d’attention portée au patient. Ce mouvement mérite donc une attention soutenue pour anticiper et réguler les dérives potentielles présentes dans cette nouvelle dynamique.
Mots-clés: privatisation, santé, soins, investissement, marché, cliniques privées, laboratoire de biologie, réglementation