À Montargis, dans le Loiret, le samedi 22 juin, un camp politique se retrouve en marge du pouvoir, réduit à la portion congrue dans les urnes, écrasé par les mouvements des grands partis. Depuis 2017 et la défaite de François Fillon au premier tour de l’élection présidentielle, Les Républicains (LR), descendant du RPR et de l’UMP, se retrouve marginalisé, au seuil de la survie, en particulier en 2022 avec les 4,8 % de Valérie Pécresse à la présidentielle. Les 7,2 % obtenus par la liste de François-Xavier Bellamy aux élections européennes de juin ont été perçus non comme une opportunité de rebond, mais simplement comme la confirmation d’un possible effacement.
Pourtant, en creusant au-delà des chiffres, en examinant en détail les enquêtes d’opinion, on constate que l’électorat de droite n’a pas disparu. Selon le dernier baromètre de confiance en politique réalisé en février par le Cevipof, 27 % des personnes interrogées se situent à droite, un pourcentage bien plus élevé que celui des partisans de gauche (22 %), d’extrême droite (9 %) ou du centre (15 %). « La droite est toujours présente, et de manière significative », souligne Bruno Cautrès, chercheur CNRS au Cevipof. « Mais son énergie se manifeste désormais dans les attitudes et les idées, avec de nombreux Français qui continuent de vouloir payer moins d’impôts, qui veulent moins d’État, moins de fonctionnaires… »
« On pourrait même dire que, sur le plan des valeurs – conservatisme, sentiment de déclin, besoin de sécurité – la droite a remporté la victoire. Mais elle n’est plus canalisée par un seul parti », explique Frédéric Dabi, directeur général de l’IFOP et responsable du département opinion publique. Il est difficile de déterminer où se situe aujourd’hui cette famille électorale éparpillée. Lorsque le président de LR, Eric Ciotti, a rejoint le Rassemblement national (RN), il a affirmé à plusieurs reprises parler au nom des électeurs de droite, alors que les cadres du parti se sont opposés à cette décision. « C’est ce que souhaite l’immense majorité de nos électeurs. Il y a un énorme fossé entre ce qui se dit à Paris, les discussions en huis clos assez déconnectées de la réalité, et ce que la base exprime dans ma ville de Nice ou ailleurs », a-t-il déclaré le 11 juin sur TF1, lorsqu’il a annoncé cette « alliance des droites », sans jamais mentionner les termes « extrême droite ». Jeudi 20 juin, dans Valeurs Actuelles, le président du parti a même regretté de ne pas avoir pu organiser un congrès pour consulter les adhérents sur cette question. Selon lui, ce vote aurait été recalé par les « barons » du parti, car ces derniers connaissaient d’avance le résultat : « Les militants LR sont de droite et refusent de considérer le RN comme un adversaire. »