Si le Rassemblement national (RN) accède au pouvoir à l’issue des élections législatives, leur position est claire : « Nous ne suivrons pas les directives imposées. » Cet avertissement, émis « de manière réfléchie et responsable », a été lancé par une quarantaine de cadres de l’éducation nationale – chefs d’établissement, inspecteurs généraux de l’administration – à travers une pétition débutant sa circulation le 14 juin. Cette initiative soulève les inquiétudes de nombreux fonctionnaires : en cas de prise du pouvoir par l’extrême droite, serait-il possible de s’affranchir des consignes données aux agents publics ?
Émanant de hauts gradés de l’éducation nationale, cette pétition avait recueilli 3 171 signatures le samedi 6 juillet. Ses rédacteurs justifient leur initiative par leur refus d’appliquer des « mesures contraires aux valeurs républicaines ». « Nous refusons d’exécuter une politique allant à l’encontre des principes fondamentaux qui sous-tendent notre engagement dans le service public d’éducation », expliquent les signataires, dont Jean-Charles Ringard, un inspecteur général à la renommée établie au sein de l’institution. En écho à cette démarche, le politologue Thomas Guénolé, ancien membre de La France insoumise (LFI), a annoncé le 1er juillet la création d’un « réseau de résistance à l’extrême droite », constitué principalement de fonctionnaires. Cette initiative consistera notamment à refuser certains ordres donnés aux agents, un manuel étant prévu selon M. Guénolé.
En réaction à cette pétition, Marine Le Pen a vivement critiqué ces prises de position dans une interview accordée au journal breton Le Télégramme le 26 juin, dénonçant « une forme de caricature permanente ». De son côté, Fabrice Leggeri, député européen du parti, a déclaré le 25 juin à Reuters : « Les mécontents peuvent partir, s’ils ne souhaitent pas travailler avec Jordan Bardella en tant que Premier ministre, ils peuvent retourner aider les trotskistes à préparer leur programme. » Roger Chudeau, député RN sortant et candidat à sa réélection, s’est montré menaçant envers les auteurs de la pétition qualifiant leurs actions de « désolantes », « scandaleuses » et « choquantes ». Il a déclaré : « Si nous accédons au pouvoir et si j’ai un rôle à jouer dans l’éducation, j’écrirai à ces personnes pour leur donner une semaine pour se rétracter publiquement et s’excuser, sinon elles seront convoquées devant un conseil de discipline. » M. Bardella a cependant précisé quelques jours plus tard que si son camp remportait les élections et le nommait chef du gouvernement, M. Chudeau ne serait pas choisi comme ministre de l’éducation nationale.