Le duo formé par Alexis Corbière et Raquel Garrido incarne aujourd’hui bien plus qu’une simple collaboration politique; ils sont devenus le symbole d’une famille politique fracturée. Les élections législatives de 2024 en Seine-Saint-Denis ont mis en lumière des divisions profondes au sein de La France Insoumise (LFI). Ce conflit interne a vu ces deux figures emblématiques de la gauche affronter des candidats soutenus par leur ancien parti, révélant non seulement des tensions personnelles mais aussi des divergences stratégiques. Retour sur une bataille électorale qui menace l’unité nécessaire pour contrer la montée du Rassemblement National.
Conflit politique en Seine-Saint-Denis : une lutte acharnée
Le terme fratricide a été largement utilisé pour décrire les affrontements électoraux dans les 5e et 7e circonscriptions de Seine-Saint-Denis lors des élections législatives de 2024. Raquel Garrido et Alexis Corbière, ayant quitté La France Insoumise (LFI) après des désaccords avec Jean-Luc Mélenchon, se sont retrouvés face à des candidats soutenus par leur ancien parti, à savoir Aly Diouara et Sabrina Ali-Benali. Tandis que Corbière a réussi à se hisser en tête, Garrido n’a obtenu que 23,65% des suffrages, terminant derrière Diouara et Aude Lagarde de l’UDI.
Ces élections ont révélé des divisions profondes, non seulement entre les candidats mais aussi au sein de leurs soutiens. Les anciens alliés politiques, désormais adversaires, se livrent un combat où chaque voix compte. La rivalité est d’autant plus intense que Seine-Saint-Denis reste une terre de gauche traditionnelle mais menacée par la montée du Rassemblement National (RN). Les ambitions personnelles et les querelles internes semblent avoir pris le pas sur l’unité nécessaire pour contrer une droite en embuscade.
Sympathisants divisés et amertume
Cette polarisation politique a laissé des traces profondes chez les sympathisants. À Bobigny, Hassan, un électeur de Garrido, exprime sa frustration : « Le comportement des candidats est irresponsable », s’insurge-t-il. Pour lui, les désaccords entre candidats de gauche compromettent les chances de victoire face à des adversaires comme Aude Lagarde.
Les militants se sentent trahis et divisés, partagés entre leur loyauté envers des figures emblématiques et la nécessité de présenter un front uni pour préserver leur circonscription. Madou, une autre électrice, blâme aussi Emmanuel Macron pour avoir précipité les élections, réduisant ainsi le temps de préparation des partis et exacerbant les tensions internes. Les résultats des premiers dépouillements montrent Diouara légèrement en tête, un coup dur pour les militants de Garrido, qui voient leurs chances de victoire s’amenuiser en raison de cette division.
Stratégies et tensions pour le second tour
Le second tour s’annonce crucial et tendu. Alexis Corbière et ses soutiens se réunissent au Petit Pub à Montreuil pour suivre les résultats. Bien qu’ayant triomphé au premier tour en 2022 avec une large majorité, les militants ressentent une forte pression. L’ascension du Rassemblement National au niveau national alarme les esprits.
Mathilde, une fervente supportrice de Corbière, insiste sur l’importance de devancer Sabrina Ali-Benali pour conserver leur place de leader au sein de la gauche dans la circonscription. Elle qualifie la mise à l’écart de Corbière de « scandale » et souligne qu’une victoire nette pourrait redresser la situation. La tension est palpable, chaque action, chaque parole peut influencer l’issue de ce scrutin déterminant.
Urgence d’une union face à la montée du RN
Les divisions internes à gauche pourraient bien profiter au Rassemblement National, une menace jugée beaucoup plus grave par des militants comme Clément, qui regardent avec inquiétude les résultats du scrutin. « C’est insensé d’avoir ce genre de querelles alors que le RN se renforce », déclare-t-il.
Cette situation critique appelle à un sursaut collectif. Clément plaide pour des désistements stratégiques dans les triangulaires et l’instauration d’un barrage républicain pour contrer le RN. Cet appel résonne avec force au sein du camp de Corbière, qui, tout en étant satisfait de ses bons résultats au premier tour, sait qu’il repose sur une majorité fragile. Une union de toutes les forces de la gauche est jugée indispensable pour éviter un basculement vers l’extrême droite.
Perspectives et avenir politique en Seine-Saint-Denis
L’avenir politique de Seine-Saint-Denis dépendra en grande partie de la capacité des différentes factions à dépasser leurs différends. Alexis Corbière, malgré sa première place au premier tour, appelle à l’unité : « Ce duel fratricide a mobilisé tant d’énergie, alors que d’autres circonscriptions en avaient besoin face au RN ».
La prochaine étape sera décisive. Les candidats et leurs soutiens devront mettre de côté les rancœurs et travailler ensemble pour s’assurer que ces circonscriptions restent un bastion de la gauche. Les électeurs, eux, sont à la croisée des chemins, entre fidélité à des leaders historiques et pragmatisme politique.
L’urgence est donc à la mobilisation et à la réconciliation, pour éviter que des querelles internes ne conduisent à une victoire inattendue du RN. Le second tour sera le test ultime de cette capacité à s’unir pour préserver une Seine-Saint-Denis fidèle à ses valeurs progressistes.