Le Botswana se prépare à élire son président et les membres du Parlement le 30 octobre, après une campagne électorale marquée par le retour surprise de l’ancien chef d’État Ian Khama. Ce dernier, qui avait désigné Mokgweetsi Masisi comme son successeur en 2018, souhaite désormais renverser celui qu’il a lui-même propulsé à la tête du pays. Masisi, au pouvoir depuis six ans, fait face à des défis économiques majeurs, amplifiés par une baisse de la demande de diamants, la principale ressource du Botswana, et à une lutte croissante contre le chômage supérieur à 25 %.
L’élection de 2024 promet d’être un tournant crucial pour le Botswana, dont la population s’élève à 2,6 millions d’habitants. Le retour d’Ian Khama, ancien président populaire, après plusieurs années d’exil, apporte une dynamique inédite à la scène politique. Son influence, bien que contestée, est palpable, comme l’a noté le politologue Zibani Maundeni : « Le retour de Ian Khama a modifié le paysage politique. Ses meetings rassemblent de larges foules »
. Son soutien à l’opposition pourrait mettre à mal les réelles chances de réélection de Masisi, malgré la solidité historique de son parti, le Botswana Democratic Party (BDP).
Contexte économique et attentes populaires
Le Botswana, connu pour sa stabilité politique et sa croissance économique basée sur l’exploitation des diamants, fait face à une situation préoccupante. Sous la présidence de Masisi, la croissance s’est considérablement amoindrie. Tandis que l’économie nationale est menacée par une réduction des revenus miniers, le chômage atteint des sommets, et la disparité entre les riches et les pauvres demeure l’une des plus marquées au monde. Selon la Banque mondiale, plus de 25 % des citoyens sont sans emploi, exacerbant le mécontentement populaire.
Tandis que l’opinion publique gronde, Tendai Mbanje, un chercheur au Centre africain pour la gouvernance, souligne que « Les citoyens ont l’impression de ne pas profiter pleinement des richesses minières du pays »
. Malgré les investissements gouvernementaux dans les infrastructures et les services publics, beaucoup estiment que ces efforts ne se traduisent pas par des bénéfices tangibles pour l’ensemble de la population.
La dissension politique et le paysage électoral
La scène politique est caractérisée par une division au sein de l’opposition, notamment représentée par l’Umbrella for Democratic Change (UDC), une coalition de gauche. Duma Boko, son leader, peine à rassembler les forces dissidentes, notamment avec le départ du Front patriotique du Botswana (BPF) et du Parti du Congrès du Botswana (BCP), qui ont chacun choisi de présenter leur propre candidat. Ian Khama, âgé de 71 ans, soutient principalement le BPF dans sa quête de réformer le système actuel.
Avec la polarisation des opinions, Adam Phetlhe, commentateur politique, observe que « la nation est divisée »
. Les ceux qui espéraient un changement de cap de la part de Masisi se disent aujourd’hui déçus. Si Masisi l’emporte, ce pourrait être avec une faible marge, un reflet d’un climat politique tendu et d’un désir de changement parmi le peuple.
Les ramifications du retour de Khama
Le retour de Ian Khama est un spectacle à suivre de près. Après un exil en Afrique du Sud, il a exprimé son désir de « réparer l’erreur »
qu’il a commise en désignant Masisi. Selon lui, depuis son accession au pouvoir, son ancien protégé a sapé les fondements mêmes de la démocratie. De plus, les relations étroites entre Masisi et des régimes autoritaires, comme celui d’Emmerson Mnangagwa au Zimbabwe, suscitent des craintes au sein de la population et alimentent les critiques concernant le respect des droits civiques.
La perspective de cette élection soulève également des interrogations sur la gestion des ressources naturelles du pays et sur les politiques environnementales, notamment l’interdiction de la chasse à l’éléphant, une politique que Khama avait soutenue mais qui a été remis en question par son successeur.
Alors que le pays s’approche du jour des élections, les spéculations sur l’avenir du Botswana se multiplient. L’issue de ce scrutin pourrait redéfinir les priorités politiques et économiques dans un pays qui aspire à mieux utiliser ses ressources naturelles au bénéfice de tous ses citoyens.
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