Dans une rue animée de Pékin, le 17 janvier 2024, une scène inquiétante se déroule : de nombreuses femmes reçoivent des appels intrusifs de l’administration locale. Mme Mao, une enseignante de près de 30 ans originaire de la province du Jiangsu, a ressenti à la fois surprise et agacement face à ces sollicitions. Lors de l’un de ses premiers échanges, en mai dernier, elle a été contactée par une employée du comité de quartier, qui, bien que peu insistante, souhaitait l’informer sur l’importance de la supplémentation en acide folique si elle envisageait une grossesse. En revanche, la seconde fois, en octobre, une autre fonctionnaire lui a posé des questions beaucoup plus personnelles concernant son cycles menstruels, ce qui lui a fait ressentir une intrusion inacceptable dans sa vie privée.
« Ils se prennent pour la police menstruelle ? C’est complètement déplacé, c’est ma vie privée, » s’est-elle exclamée, marquant son indignation face à une telle ingérence.
Ces appels, dont de plus en plus de Chinoises en âge de procréer sont victimes, s’inscrivent dans un contexte préoccupant pour le gouvernement : la chute de l’indice de fécondité en Chine. En effet, ce chiffre a atteint un alarmant 1,09 enfant par femme en 2022, bien en dessous du seuil de 2,1 enfants, nécessaire pour maintenir une population stable. Pour illustrer l’ampleur de ce phénomène, la population chinoise a diminué de deux millions de personnes en 2023, une première dans l’histoire, plaçant la Chine derrière l’Inde en matière de démographie.
Une Démographie en Déclin
Face à ce déclin démographique, l’État chinois s’inquiète des conséquences à long terme sur son développement économique et social. Selon les prévisions des Nations Unies, la population de la Chine pourrait diminuer de plus de 200 millions d’ici 2054, atteignant une baisse spectaculaire de plus de 50 % d’ici 2100. Le pays, qui comptait près de 1,4 milliard d’habitants, doit désormais faire face à une réalité où moins de Chinois choisissent d’avoir des enfants.
Les Héritages des Décades Passées
Il est essentiel de rappeler qu’entre 1980 et 2016, la politique de l’enfant unique a façonné les mentalités, interdisant la plupart des familles d’en avoir plus d’un. Bien que cette mesure ait été levée, les effets sur la société se font encore ressentir. Les jeunes Chinois, influencés par une éducation accrue et des aspirations professionnelles, préfèrent souvent retard leurs choix parentaux. Le coût d’élever un enfant étant par ailleurs devenu prohibitif, peu de familles estiment qu’elles peuvent se permettre de faire plus d’un enfant.
Les Obstacles à la Procréation
La question du financement est centrale dans le désir d’enfants. Le coût élevé du logement dans les grandes villes, combiné à des services de garde d’enfants souvent inaccessibles financièrement, constitue un frein majeur. Mme Mao évoque d’ailleurs la nécessité pour le gouvernement d’agir sur ces problématiques fondamentales : « Le gouvernement ferait mieux de s’atteler davantage à réduire le coût induit par le fait d’élever un enfant, » dit-elle. Cela souligne la dualité du désir de procréer face aux réalités économiques difficiles.
Un Futur Incertain
Alors que la Chine se montre de plus en plus préoccupée par son indice de fécondité en chute libre, le besoin d’un changement structurel se fait de plus en plus urgent. La réticence des jeunes à fonder une famille pourrait engendrer des répercussions socio-économiques graves à l’avenir. Le pays se doit de créer un environnement propice aux familles, en repensant ses politiques et en soutenant les jeunes couples dans leur projet de vie.
Les événements récents mettent donc en lumière la nécessité d’un dialogue sur ces questions cruciales, afin de bâtir un avenir où la natalité ne serait pas un sujet de préoccupation constante, mais plutôt une décision fondée sur des choix éclairés et des conditions facilitées.
Mots-clés: fécondité, démographie, Chine, politiques familiales, âge de procréer, coût de la vie