Dans son premier roman, Najat ou la survie, la journaliste et autrice franco-marocaine Rania Berrada aborde la question de fond de la possibilité pour une jeune femme diplômée marocaine de prendre en main son propre destin. Son héroïne, Najat, âgée d’une vingtaine d’années, débute une licence de biologie à l’université d’Oujda, sa ville natale. Issue de la classe moyenne, elle est vite confrontée à la mentalité étouffante de sa famille et des commérages de sa ville, qui considèrent que le parcours universitaire d’une femme n’est pas aussi important que le mariage et les enfants. Sans réseau professionnel, elle risque de rejoindre les rangs des milliers de diplômés chômeurs de son pays.
Afin de sortir de cette situation, Najat s’accroche à ses études et espère trouver un époux qui l’emmènera vivre dans une grande ville. Elle se laisse courtiser par Younès, mais ce dernier se défausse finalement. Elle tente alors de prendre en main son destin et projette des études en Allemagne, mais un impair administratif de son oncle vient annuler son projet. Lorsqu’un nouvel époux potentiel se présente, Najat l’accepte d’autant plus qu’il vit en France et pourrait l’emmener au-delà des frontières du Maroc. Malgré l’obtention du visa, le marathon administratif pour rejoindre son mari commence.
Rania Berrada a fait le choix d’une écriture apparemment distanciée et factuelle pour raconter le parcours de cette femme allant d’espoirs en déceptions, cherchant sa route entre volonté et soumission. Elle observe Najat sous tous les angles, de son apparence et ses comportements publics à ses désirs et pensées secrètes, et montre ainsi la profondeur du gouffre actuel entre ce que la société exige des femmes et ce qu’elles sont nombreuses à penser ou à ressentir.
Mots-Clés: Maroc, femmes, chômage, époux, migration, féminisme.