mercredi 22 janvier 2025

La Fonderie de Bretagne en quête de repreneur après dépôt de bilan

Face à une crise industrielle sans précédent, la Fonderie de Bretagne traverse une période critique, marquée par une demande de placement en redressement judiciaire. Cette décision, annoncée par la direction de l’usine située à Caudan, dans le Morbihan, reflète les tensions économiques et sociales entourant cette entreprise historique. Alors que 350 emplois sont en suspens, cette situation suscite une forte mobilisation des salariés, soutenus par les syndicats, pour préserver l’avenir de cet acteur clé de l’industrie bretonne. Entre dépendance à Renault et recherche d’un repreneur solide, l’heure est à la réflexion sur des solutions durables.

Les salariés se mobilisent à Rennes pour sauver la Fonderie de Bretagne

Ce mercredi matin, environ 200 salariés de la Fonderie de Bretagne, située à Caudan dans le Morbihan, se sont rassemblés devant le tribunal de commerce de Rennes. Venus à bord de quatre cars affrétés par la CGT, ils manifestaient leur inquiétude pour l’avenir de leur entreprise. La direction de l’usine a officiellement demandé un placement en redressement judiciaire assorti d’une recherche de repreneur, une mesure qui reflète l’urgence de la situation. La décision finale du tribunal est attendue dès jeudi, une échéance qui laisse peu de temps aux salariés pour inverser la tendance.

Avec 350 emplois en jeu, l’atmosphère était lourde d’incertitude. Depuis quelques jours, la fonderie, qui fabrique principalement des pièces en fonte pour les suspensions et échappements automobiles, est placée en cessation de paiements. Cette situation, qualifiée de critique, pousse les travailleurs à revendiquer activement des solutions durables pour sauver leur emploi.

Pour de nombreux salariés, cette mobilisation est une tentative ultime pour influer sur les décisions du tribunal. Jérôme Dupont, le directeur général, a lui-même souligné que la position de Renault serait cruciale dans le dénouement de ce dossier. Si l’espoir persiste, c’est une véritable course contre la montre qui s’engage pour préserver le futur de cette entreprise bretonne emblématique.

De Renault à Callista : une filiale historique en crise

Autrefois filiale emblématique de Renault, la Fonderie de Bretagne a traversé des bouleversements majeurs ces dernières années. En 2022, Renault a vendu cette usine historique au fonds d’investissement allemand Callista Private Equity. Une décision stratégique marquée par la volonté du constructeur automobile de se recentrer sur son cœur de métier. Toutefois, malgré cette cession, Renault demeure le principal client de la fonderie, plaçant la filiale dans une dépendance commerciale complexe.

Ce changement de propriété n’a pas réussi à stabiliser durablement la situation de l’entreprise. Confrontée à des coûts de production élevés, une baisse des commandes et un environnement concurrentiel féroce, la crise s’est intensifiée en 2023. La cessation de paiements récemment déclarée est l’illustration des difficultés persistantes qui fragilisent cette entité autrefois prospère.

Pour les employés, la transition vers Callista est perçue comme un pari manqué. « La vente devait offrir un renouveau, mais les problèmes structurels n’ont jamais été résolus », déplore un membre du personnel. La dépendance à Renault, tant pour les commandes que pour la gestion administrative du dossier, continue de peser lourdement sur l’avenir de la Fonderie de Bretagne.

Un projet avorté : Renault face à l’échec de Private Assets

En juillet dernier, des discussions prometteuses avaient été engagées avec le fonds d’investissement allemand Private Assets, qui prévoyait de reprendre la Fonderie de Bretagne. Ce projet offrait une lueur d’espoir, notamment grâce à la promesse d’un plan de charge de 11.000 tonnes de production. Cependant, les espoirs ont été rapidement douchés lorsque Renault a refusé, en décembre, de s’engager sur des commandes futures, ce qui a conduit à l’échec de l’accord.

Cette décision, particulièrement mal accueillie par les syndicats, a laissé un goût amer. Pour Maël Le Goff, secrétaire général de la CGT, la situation résulte d’un manque de coordination et d’une absence de vision stratégique à long terme de la part de Renault. « Le constructeur a froidement exécuté le projet juste avant Noël, laissant les salariés dans l’incertitude », déclarait-il à la sortie de l’audience.

La responsabilité de Renault dans cet échec est au cœur des débats. Si le constructeur justifie son choix par des contraintes économiques, les syndicats accusent le groupe d’abandonner un site industriel de référence en Bretagne. Cet épisode met en lumière les défis du secteur automobile face à la transition économique et écologique, où les petites structures comme la Fonderie de Bretagne peinent à trouver leur place.

Syndicats en alerte : des leçons à tirer pour l’avenir

La mobilisation actuelle des syndicats met en évidence un enjeu crucial : l’importance d’un soutien industriel local et d’une meilleure gestion des transitions. La CGT, fer de lance du mouvement, insiste sur la nécessité de conditions plus strictes pour les repreneurs potentiels. « Nous ne voulons pas revivre un scénario catastrophique comme avec Callista », a déclaré un syndicaliste à Rennes.

Pour les fédérations syndicales, les échecs successifs pointent vers un modèle industriel en crise. Les conditions des cessions, souvent dictées par des impératifs financiers à court terme, négligent l’impact social et économique sur les territoires concernés. L’absence de garanties de commandes, comme dans le cas de Renault, souligne aussi une lacune majeure dans la gestion des relations entre donneurs d’ordre et sous-traitants.

Cette situation devrait servir de leçon pour l’avenir. Les syndicats appellent notamment à une réforme des processus de reprise pour sécuriser l’emploi et limiter les risques liés aux changements de propriétaires. Une meilleure implication des pouvoirs publics est également réclamée pour éviter que des sites stratégiques ne tombent inexorablement dans le déclin.

Quel avenir pour la Fonderie de Bretagne ?

L’avenir de la Fonderie de Bretagne reste plus incertain que jamais. Avec le dépôt de bilan et l’absence de repreneur solide, plusieurs scénarios sont envisageables. Le pire d’entre eux serait une fermeture définitive, un coup dur pour les 350 salariés et pour la région bretonne. Pourtant, un espoir subsiste : un acteur industriel ou un fonds d’investissement pourrait encore se manifester pour relancer l’activité.

La clé de la survie résidera dans la capacité à adapter le modèle économique aux exigences du marché. Des pistes telles que la diversification des produits, l’innovation technologique ou même un positionnement dans la transition écologique pourraient redonner à la fonderie un avantage compétitif. Cependant, cela nécessitera des investissements massifs et un engagement fort de tous les acteurs impliqués, y compris Renault.

En attendant la décision du tribunal et un éventuel repreneur, les salariés restent mobilisés pour défendre leur outil de travail. Cette résilience montre que, malgré les crises, la Fonderie de Bretagne incarne un patrimoine industriel précieux et un potentiel à exploiter pour l’économie régionale. Mais sans un plan concret et des engagements fermes, l’avenir reste suspendu à un fil.

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